Ma chère Teresa,
Jamais, je n’ai envisagé la vie sans toi. Sans ta présence bienveillante, tes idées à la fois surprenantes et pleines de bon sens, qui font envisager les choses autrement et remettent sur le « droit » chemin, qui est souvent un autre chemin, et conduit à d’autres découvertes. Depuis si longtemps que tu es là pour moi… J’espère qu’en grandissant j’ai pu de temps en temps, moi aussi, être là pour toi. Je me souviens de mon désarroi quand j’ai découvert, sur une boîte mail que je n’utilisais plus depuis longtemps, une série de messages de toi, de discrets appels à l’aide, auxquels je n’avais jamais répondu.
Ma très chère Teresa, tout à coup le temps presse et je n’arriverai jamais à te dire tout ce que j’aimerais te dire. Je pensais que nous avions encore devant nous de nombreuses soirées de discussion passionnée, où les sujets graves et sérieux côtoyaient une gaie frivolité. On ne s’ennuyait jamais, on se jetait dans le débat, dans une discussion qui tout à coup devenait cruciale à nos yeux, nos idées s’empilant les unes sur les autres pour former des constructions bizarres mais tout de même réjouissantes. Parce que s’il y a bien quelque chose qui te caractérise, c’est la joie.
Je croyais qu’on avait encore plein de temps pour élaborer une stratégie pour faire de la systémique, non pas un ornement de la pensée, mais une fondation indispensable. Plus que jamais indispensable. Je crois qu’on a en commun de voir les relations, et de souffrir de leur rupture par ceux qui ne les voient pas – et ils sont nombreux. Mais tu es la plus systémicienne de nous deux, et certainement la plus stratégique. Je crois que tu es née systémicienne. On dirait que tu fais ça sans effort.
Ma chère Teresa, je dois aussi te dire à quel point je t’admire, je t’ai toujours admirée. Pour ton esprit libre et créatif, pour tes idées sorties de nulle part (en apparence) pour ton courage, ta détermination, pour ton humour et tes éclats de rire, pour ta curiosité, tes connaissances incroyables, ta générosité, ta force. Quelle chance j’ai eu de croiser ta route. Je crois que c’est le cas de beaucoup de gens, dont la vie a été changée après t’avoir rencontrée. Je pense que tu laisses beaucoup d’orphelins.
My dearest mexican girl, je ne sais pas ce que l’avenir nous réserve. On dit que les gens continuent de vivre à travers leurs idées, dans ton cas il me semble que c’est autant par les livres et les articles que tu as écrits que tu vas rester avec nous, que par les changements que tu as induits chez beaucoup de gens, des gens dont la rencontre avec toi a réorienté la vie, comme après une collision ; ils sont partis ailleurs, se sont mis à voir la vie autrement. Et ces changements vont se transmettre, faire des petits, se répandre – c’est ça aussi, la systémique. Et tu seras dans chacun de ces petits changements. De mon côté, c’est peut-être un peu grandiloquent ce que je vais dire, et je m’excuse d’avance, mais ce que je voudrais faire pour toi, c’est redoubler d’efforts pour développer des moyens méthodologiques pour percevoir et mettre à jour les relations.
Ma chère Teresa, tout ceci est très injuste. Nous t’aimons tous, nous t’aimons. Et mon amour pour toi est très vaste.
Je t’embrasse tendrement,
Véronique
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